Éclosion
Les naissances ne sont jamais celles que l’on imaginait, baignées de joie ou de larmes, aboutissement d’amour ou de drame, quels que soient les espoirs que l’on y projetait.
Les départs ne sont jamais annoncés de la manière qu’il faudrait, avec émotion ou légèreté, quand ils se produisent comme une déflagration dans une chambre à coucher.
Les changements ne se concrétisent jamais dans l’ordre imaginé, fruits d’une planification et d’un ordonnancement que la réalité fait exploser.
Lorsque s’annonce la transformation annoncée, chacun fait du mieux qu’il peut, avec ce qui lui est donné, de chance, de fatalité, de hasard ou d’aléa insoupçonné.
Lorsque se présente ce que l’on redoutait, que l’on ait anticipé ou que l’on découvre la vérité, il n’est rien d’autre que l’on puisse faire, à part de le confronter.
Lorsque s’invente ce qui doit arriver, il ne sert que peu de fuir ou de se recroqueviller, puisque le présent ne nous quittera jamais.
Le destin n’est pas ce démiurge qui s’en vient nous torturer. Il n’est pas plus à lire dans les cartes ou dans les runes, mais au sein de qui l’on est.
La trame de notre existence n’est pas d’obligation ces dessins de solitude ou de souffrance, car nous ne vivons pas pour être le martyr que l’on pense.
Les buts que l’on se fixe ne sont pas à la hauteur des rêves que l’on pourrait incarner, si l’on n’écoute pas cette voix qui nous rappelle le magicien que l’on est.
Chercher à tout prix à devenir celui ou celle que l’on voudrait ne nous aidera pas à comprendre que l’on a déjà en soi toute notre identité.
Courir les gourous ou les maîtres incontestés ne nous offrira pas l’aide que l’on espérait, mais servira à nous renvoyer nos propres reflets.
Se persuader que le meilleur est ce qui va arriver est se leurrer et oublier que le futur n’est qu’un mirage que l’on ne cesse de projeter.
Reproduire l’exacte réplique des châteaux de ceux qui nous ont précédés ne fait qu’oblitérer à quel point on est unique et singulier.
Prendre exemple sur ce qui a déjà été fait ne nous mènera pas plus que loin que là où sont ceux qui se sont arrêtés.
Se rassurer en ne dérivant pas d’un iota sur le chemin sur lequel on nous a posés ne servira qu’à nous conduire là où sont nos pieds et non notre cœur émerveillé.
Ne voir le monde qu’au travers du prisme de ce qui a déjà été fait à chaque seconde ne conduit que sur une fausse piste, celle où l’on sombre.
Ne considérer que ne peut exister rien de mieux que ce qui a déjà été fait n’aboutira qu’à contempler l’écroulement des ruines du passé.
Ne supposer que l’on est là qu’aux fins de végéter finira par nous faire ressembler à un fossile pétrifié.
Assister au déroulé de sa vie comme s’il était déjà écrit ne servira au final qu’à remplir sa propre nécrologie.
Estimer que s’agiter ne conduira qu’à s’épuiser au lieu d’attendre que tout vienne à notre portée revient à commencer à édifier son propre mausolée.
Croire que l’on ne peut que subir tout ce que l’on va rencontrer équivaut à se taper la tête contre un miroir en espérant le traverser.
Ce n’est qu’à l’instant où l’on entend les messages que l’on ignorait que se proposera ce que l’on désirait.
Ce n’est qu’au moment où l’on observera le monde tel qu’il est que l’on aura une chance de se l’approprier.
Ce n’est que le jour où l’on sera le changement après lequel on priait que se montrera toute la puissance que l’on retenait.
S’accomplir par ce que l’on fait, plutôt que de fuir par la pensée les conséquences de ce que l’on crée nous servira de point de repère pour nous approprier nos souhaits.
Définir avec ambition le bonheur que l’on souhaite traverser nous permettra de vivre avec émotion chaque événement que l’on va se proposer.
Considérer que le centre de notre être n’est pas la raison, mais ces intuitions que l’on peut laisser s’exprimer nous prodiguera la joie ineffable d’enfin s’écouter.
Il n’est pas de plus grande félicité que de se remercier, pour toutes nos peurs et tous nos efforts pour les surmonter, en toute honnêteté.
Il n’est pas de plus grand privilège que de vivre au rythme des battements que notre cœur fait résonner, en le saluant de nous montrer l’élan à respecter.
Il n’est pas de plus belle satisfaction que de s’écouter, pour enfin réaliser que nous sommes, et le sage respecté, et le nouveau-né.
Et il n’est pas de plus grand honneur que d’être incarné,
pour faire éclore tout l’amour que l’on peut partager.
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