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Frémissement

Le jour n’est pas encore levé que plane dans l’air le parfum d’un changement annoncé, brumes de joie et d’impatience mêlées.

Le jour n’est pas encore levé que l’orbe du soleil rayonne déjà d’une aura que le paysage s’applique à diffuser.

Le jour n’est pas encore levé que la nature bruisse d’agitation et de questions, en ce qui s’annonce comme une révolution.


Dans l’humidité d’une rosée encore fraîche, les herbes, les mousses et les fleurs ensuquées se troublent sous une brise qui s’en vient les réveiller, en douceur, sans bruit et sans heurt, juste pour les préparer à ce qui se présente et auquel elles vont assister.

Dans la torpeur de la fin d’une nuit agitée, les chouettes, chauves-souris et araignées regagnent leurs tanières qu’elles avaient quittées pour écumer les ténèbres et se nourrir des proies qui ont eu l’audace de les défier.

Dans la lueur de ces rayons qui n’ont pas encore percés, le ciel se pare de couleurs que seul ce moment de transition entre l’avant et l’après s’autorise de montrer : du rose, du bleu, du jaune, avant-goût de l’arc-en-ciel rêvé.


Les songes de la nuit ne sont pas encore dissipés, planant à la surface de ce monde en train de s’éveiller. Il n’est pas encore tout à fait clair si les fantasmes traversés tiennent du cauchemar terrifié ou du rêve idéalisé.

L’hébétude maladroite encore présente dans l’atmosphère dense et moite peine à se transformer en réveil nécessaire pour se confronter à ce que la journée va proposer de défis et de libertés.

L’envie de ne pas se lever fait aussi partie de celles qui assaillent ces êtres à deux ou quatre pattes, pour se préserver de supposés dangers ou de réelles attaques, plus ces autres que l’on va générer soi-même pour passer une étape.


Les heures qui s’annoncent dans cette semi-clarté ne dévoilent pas encore ce qu’elles vont offrir de surprises et de variétés, dans une attente prudente de voir qui sera prêt à les traverser.

Seule la lumière marque le franchissement de cette frontière entre l’après et l’avant, ce temps où l’on peut commencer à se sentir à nouveau vivant, revenu de ces voyages dans le néant.

Le métronome de l’alternance entre le jour et la nuit chasse les spectres et les fantômes qui encombraient nos esprits, évacuation nécessaire pour ne plus regarder en arrière, et au contraire, admirer cet astre qui bouleverse les repères.


Dans l’air qui s’allège monte peu à peu une musique, comme celle d’un manège, faite de bruissements d’ailes et de bourdonnements, dans un nouveau solfège de la danse du vivant, mélodie sans cesse renouvelée à chaque instant qui se crée.

L’agitation qui se concrétise n’est que la répétition de cet éternel recommencement qu’est chaque matin en révolution, ballet permanent et pourtant différent qui acte le retour de la vie et de ses cris, après des heures de chuchotements.

Aussi désordonné et chaotique que cela paraisse, les mouvements et les directions s’organisent dans une trame systématique, qui échappe pourtant à la raison, dans une pirouette magique.


Par cette transition entre l’éveil et l’endormissement se renouvelle l’énergie que l’on tenait en dedans, d’usée et épuisée, à neuve et vivifiée, dans une renaissance impressionnante, merveille d’enchantement.

Cette subtile variation qui arrache à l’inertie de la raison autorise toutes les possibilités de se concrétiser, pour que les heures qui se déroulent ne souffrent plus d’hésitation ni de latence, comme une profonde et puissante houle de l’océan immense.

Cette métamorphose qui ne dit pas son nom, où l’on redevient, non pas ce que l’on était, mais la somme de toutes nos potentialités, en un miracle de recombinaisons pour que l’on cesse de se réinventer, irrigue et nourrit ce que l’on sait et que l’on a oublié.

Ce tremblement qui indispose et reste nécessaire pourtant, afin que la gangue de regrets et de peurs se brise pour ne laisser que la joie d’exister, s’installe et s’amplifie pour prendre une ampleur magistrale et signifier la vie.


Frémissement - https://www.laurenthellot.fr/

Et tandis que les rayons du soleil éclatent enfin de beauté et d’énergie, le monde entier se contemple hébété et groggy, incapable de comprendre de quelle manière ce renouveau rejaillit.

Et tandis que chacun renonce à ses draps, à son lit, à son abri, l’éclat du jour perce d’au travers les volets, les rideaux, les fenêtres, pour envahir pièces et recoins, distiller sa petite musique de fête.

Et tandis que se réchauffent l’air et les cœurs, rassérénés par cette douce lueur, les idées et les sensations se rassemblent, en une célébration du bonheur d’être ensemble et de partager ce nouveau jour aux couleurs qui tremblent.


De ce frémissement qui paraissait insignifiant est ainsi né ce miracle permanent : la chance de tout redécouvrir, ici et maintenant.

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